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Alors que 43% des engagements (2015-2020) d’Alpha Condé dans le secteur agricole n’ont pas connu un début de réalisation, le Président et son Premier ministre en font de nouvelles promesses

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Depuis son avènement à la magistrature suprême en décembre 2010, le Président de la République, Pr Alpha Condé, a toujours voulu ressortir dans ses discours à toute occasion, que ce soit en Guinée ou ailleurs, que l’épanouissement du petit paysan reste une obsession incessante pour sa personne. 

Ainsi, lors de la campagne pour le scrutin présidentiel du 18 octobre 2020, Alpha Condé n’a cessé de promettre aux Guinéens de faire du secteur agricole une référence dans la sous-région.

Lahidi en a répertorié 23 nouvelles promesses que le Président et son Premier Ministre entendent mettre en œuvre au cours des six prochaines années. Ces promesses sont issues principalement du Programme de gouvernance 2020-2026 et de la déclaration de politique générale du Premier Ministre Ibrahima Kassory Fofana devant les députés à l’Assemblée nationale, le 7 avril 2021.   

Des engagements qui peinent à produire des effets escomptés depuis 2015 :

Depuis 2015, la plupart des initiatives qui ont été mises en place dans le secteur agricole avec tous les espoirs autour, n’ont malheureusement pas abouti au résultat escompté.

Le rapport global Lahidi publié au mois d’octobre 2020 a démontré que sur  14 engagements pris par Alpha Condé dans le secteur agricole, seulement 1 promesse a été réalisée, soit un taux de réalisation  de 7%. Par contre, entre 2015-2020, 43% des promesses de ce secteur n’ont pas connu un début de matérialisation. 

Nonobstant tous ces manquements dans la mise en œuvre des engagements pris dans les secteurs de développement durable, en l’occurrence l’agriculture, Alpha Condé et son Premier Ministre continuent à pratiquer leur sport favori, promettre au monde paysan de transformer leur rêve en réalité dans un futur très proche. 

Améliorer la fertilisation des sols, une alternative incontournable pour la sécurité alimentaire…

Dans les documents de gouvernance pour la période 2020-2026, nous avons noté une volonté du Chef de l’Etat et de son Premier Ministre d’améliorer la production agricole et de réduire l’importation des produits alimentaires. Cela se traduit notamment dans les promesses de ‘’restaurer les zones dégradées par les systèmes agricoles basés sur le nomadisme agricole; aménager tous les grands bassins agricoles nationaux, …’’ 

Cette ambition du Président pourrait être une bonne mesure pour améliorer la production agricole et aussi conserver les richesses végétales, et surtout du sol. Car, la réalité est alarmante dans les zones rurales de la Guinée. 

En effet, après deux à trois récoltes les paysans abandonnent souvent les zones exploitées au profit de nouvelles terres agricoles. Cela sans  aucune mesure de reconstitution du couvert végétal. Conséquences, les sols sont dégradés, les forêts sont abîmées d’année en année, les terres cultivables se raréfient. Cette exploitation abusive du sol constitue même l’une des principales causes du tarissement des marigots et des cours d'eau.

Donc, une initiative qui vise à restaurer les zones dégradées suite à cette pratique agricole ne    peut qu’être salutaire. 

Mais, cela ne peut se faire sans une étude approfondie de tous les aspects du nomadisme agricole. Alors, il faudra donc s’y pencher conséquemment sur l’amélioration de la fertilisation des sols dans les domaines agricoles adéquats, ensuite trouver des voies et moyens propices pour amener ces populations vers l’agriculture moderne. Est-ce que de telles mesures ont déjà été envisagées par l’Etat guinéen ?

Ensuite, pour faire de la Guinée un grenier agroalimentaire (produits agricoles et horticoles, lait, viande, poissons), des actes doivent être liés aux paroles. En dehors des effets d’annonce, concrètement le Gouvernement doit poser des actes qui pourront mettre la Guinée sur cette voie. Dans les zones agricoles du pays, l’Etat est plus ou moins absent, les producteurs évoluent avec leurs petits moyens de bord. Avec cette réalité qui est connue de tous, transformer la Guinée en grenier agroalimentaire dans les bureaux climatisés de Conakry, ne serait qu’un autre rêve impossible, nourri par le Gouvernement de Dr Kassory Fofana. De surcroît, cela voudrait donc dire, que la volonté d’assurer une sécurité alimentaire et nutritionnelle pour chaque ménage guinéen en six (6) ans n’est réalisable que si l’Etat s’implique pleinement pour apporter aux agriculteurs de véritables accompagnements en termes d’intrants agricoles, de conseils et de suivis, et enfin de réglementation du marché. 

Les agropoles, le moyen efficace pour une indépendance agro-alimentaire… 

D’un autre côté, depuis toujours, les producteurs se sont constitués en groupements ou en organisations en vue d’obtenir des appuis techniques et financiers dans le but d’améliorer leur production agricole. 

L’engagement du Chef de l’Etat à ‘’mettre en valeur le rôle des organisations de producteurs’’ pourrait permettre à ces derniers de s’impliquer davantage dans l’identification et la définition des problèmes liés au développement des filières agricoles. 

Dans le même sillage, ‘’construire une agropole par région naturelle’’ pourrait renforcer la valeur ajoutée des produits agricoles.Car, une agropole réussie réduira considérablement la dépendance exorbitante de la Guinée aux produits agro-alimentaires importés. 

Il faut noter qu’au niveau des agropoles, des entreprises de production, de transformation et de commercialisation y sont développées, avec lesquelles les petits producteurs obtiendront beaucoup d’avantages. C’est une expérience qui a bien réussi par exemple au Sénégal et au Cameroun. Cela serait sans nul doute un véritable moyen pour ‘’promouvoir davantage la transformation locale des produits agricoles par l’intensification des initiatives présidentielles axées sur des filières porteuses : anacarde, palmier à huile, cacao, ananas, café robusta, café arabica et hévéa’’. 

Du côté des agropoles, la création de 10 coopératives agricoles et 5 plateformes multiservices, soit respectivement 330 coopératives et 165 plateformes multiservices pour les préfectures, ne pourrait qu’accroître la valeur des produits agricoles. Car, une coopérative collecte et transforme les productions agropastorales, tout en créant des activités économiques dans son territoire et surtout suffisamment d’emplois. 

Maintenant, il reste à savoir quelles sont les dispositions prises par l’Etat pour mener à bien la réalisation de ce projet, pour ne pas que ça se limite à un simple document imprimé et exhibé aux yeux des gouvernés.

Des intrants agricoles et des semences de qualité quasi-inaccessibles aux producteurs…

L’une des plus grandes difficultés à laquelle les producteurs sont confrontés au quotidien, c’est celle liées aux problèmes d’accès aux intrants agricoles et aux produits phytosanitaires de qualité. Si le Gouvernement guinéen envisage d’appuyer et accompagner les paysans en leur dotant d’intrants agricoles et en produits phytosanitaires lors des différentes campagnes agricoles, d’aménager tous les grands bassins agricoles nationaux, approvisionner les paysans en intrants de qualité et de quantité et en semences améliorées, les producteurs n’auront pas à demander mieux. 

L’Etat, à travers la chambre nationale de l’agriculture, doit revoir son calendrier pour livrer à temps les semences et les engrais. Parce que ce retard a beaucoup impacté cette année la production en contre-saison de la pomme de terre en Moyenne Guinée par exemple. 

Par rapport aux intrants agricoles, jusqu’en novembre 2020, toute la préfecture de Dubréka ne possédait aucun tracteur opérationnel. Alors que c’est une grande zone agricole plus proche de Conakry par rapport aux autres. 

Par ailleurs, les producteurs sont confrontés aux pertes post-récolte et d’énormes difficultés d’écoulement de leurs récoltes, ceci par manque de lieux de conservation appropriés et une stratégie de commercialisation adéquate, surtout à cause des mauvais états des routes qui pèsent sur l’acheminement des produits vers les centres urbains. Alors, c’est pour toutes ces raisons que le gouvernement prévoit de ‘’lutter contre les pertes alimentaires grâce à des réfrigérateurs solaires et à la promotion de petites unités de transformation de produits agricoles’’.

 Donc, pour mettre un terme aux pertes post-récolte et améliorer la chaîne de valeur des produits agricoles locaux, la transformation agricole en est l’ultime solution. 

Mais pour y arriver, le renforcement des capacités techniques des producteurs-transformateurs est plus que jamais nécessaire, ils doivent être dotés de matériels efficaces et bien organisés. Ce qui va sûrement être un pilier pour ‘’assurer l’autosuffisance et la sécurité alimentaire de la Guinée, en réduisant, en particulier, la dépendance aux importations’’ promise par le Premier Ministre dans sa Déclaration de Politique Générale.

Les ministres et les hauts cadres de l’Etat appelés à prêter main-forte au monde paysan…

Dr Ibrahima Kassory Fofana a, devant les députés à l’hémicycle, promis, dans le cadre de sa Politique Générale, de « Promouvoir l’accès au financement, en particulier pour les petites exploitations familiales, Engager une politique de double révolution agricole et industrielle, Produire, au maximum ce que nous consommons et exporter au maximum nos produits transformés pour baisser considérablement le taux d’inflation, Accompagner les cultivateurs et les éleveurs traditionnels, et de Transformer nos produits agricoles et industriels afin d’en maximiser les valeurs ajoutées ». Toutes ces promesses sont incluses d’une manière ou d’une autre dans le programme de Gouvernance 2020-2026. 

La construction d’une agropole dans chaque région naturelle, comme cité ci-haut, serait le moyen le plus efficace pour aboutir à ces objectifs fixés par le chef du gouvernement.

Dans ce même document, le locataire du palais de la colombe a déclaré la nécessité d’Encourager tout le monde à cultiver, les ministres, les hauts cadres, les députés, les hommes d’affaires, etc. à s’engager tous dans l’agriculture et l’élevage. Si toutefois ces catégories de personnes citées répondaient à l’invitation du Premier Ministre, cela serait la genèse de la plus grande révolution agricole de la Guinée et même de la sous-région. Pour que l’agriculture guinéenne contribue au développement économique du pays, à la réduction de la misère et à la sécurité alimentaire, de gros investissements agricoles restent incontournables. Il faut noter qu’en Guinée, depuis quelques années, plusieurs hauts cadres et des hommes d’affaires se lancent peu à peu dans le secteur agricole. Ils détiennent des plantations et des champs agricoles à travers le pays. Mais, leur plus grand souci, c’est l’accompagnement de l’Etat qui n’existe pas, du coup, certains sont parfois obligés d’abandonner.


Cet article a été produit avec notre collaborateur externe, Mamadou Alpha Baldé, journaliste agricole.

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